Si vous faites intervenir un dieu, que le drame soit digne qu’un dieu le dénoue (HORACE, Art poétique, vers 191)
Notre esprit n’aime que ce qui est complet et achevé. L’intrigue la mieux conduite, les situations les plus touchantes ou les plus comiques, le dialogue le plus énergique ou le plus ingénieux, le spectateur oublie tout si le dénouement n’obtient pas son suffrage. C’est pour cela qu’Horace recommande aux auteurs tragiques d’éviter une intervention surnaturelle ou ce qu’on appelle le deus ex machina, dénouement postiche que ce poète relève et condamne en disant : Nec deus intersit, nisi dignus vindice nodus (Si vous faites intervenir un Dieu, que le drame soit digne qu’un Dieu le dénoue). C’est-à-dire que la grandeur du sujet justifie cette intervention.
« Tout à coup la porte s’ouvre à deux battants. Un homme entre chez le roi la tête haute. Quel est cet homme ? C’est l’empereur Charles-Quint lui-même. Il a quitté son humble cellule pour venir au secours de son bâtard : Nec deus intersit, nisi dignus vindice nodus. » (Jules JANIN, Critique du Don Juan de Casimir Delavigne)
« Pour fonder la réforme, pour briser les entraves qui enveloppaient l’humanité dans le système romain, il fallait une main plus puissante que celle d’Horace. Fallait-il un Dieu ? C’était une loi du drame chez les Anciens : un Dieu paraissait toujours pour dénouer une intrigue compliquée. Est-ce donc aussi une loi du drame que joue l’humanité dans l’histoire ? Nec Deus intersit, nisi dignus vindice nodus. Tel était pourtant le besoin de réforme morale qui tourmentait le monde païen, que, déjà bien avant la naissance du Christ, les esprits semblent s’ouvrir d’eux-mêmes aux croyances et aux préceptes de la religion future. » (CUVILLIER-FLEURY)
« Dans le Philoctète de Sophocle, on voit avec plaisir que le héros, jusqu’alors inflexible, ne cède qu’à la voix d’un demi-dieu, et d’un demi-dieu son ami. C’est bien ici qu’on peut appliquer le précepte d’Horace, qui peut-être même pensait à cette tragédie, quand il a dit : Nec Deus intersit, nisi dignus vindice nodus. » (LA HARPE, Cours de littérature)
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