Un trait impuissant et sans force (VIRGILE, Énéide, liv. II, v. 544)
Troie est au pouvoir des Grecs, et le massacre des vaincus a commencé depuis longtemps ; un des fils de Priam, Polites, a été blessé par Pyrrhus, fils d’Achille ; il s’enfuit et vient chercher un refuge près de l’autel où se tiennent Hécube et Priam, entourés de leurs autres enfants.
Mais Pyrrhus poursuit sa victime, l’atteint et l’égorge sous les yeux mêmes de ses parents. Le vieux Priam ne peut contenir son indignation, il s’écrie : « Que les dieux te punissent d’un tel crime, toi qui as répandu sous mes yeux le sang de mon fils ! Tu mens quand tu nommes Achille ton père ! Achille se laissa fléchir à la vue de Priam, son ennemi : il respecta les larmes d’un suppliant, les droits sacrés du malheur, rendit à la tombe la dépouille d’Hector et me renvoya libre au palais de mes aïeux. »
Ainsi parle le vieillard, et il lance à Pyrrhus un trait impuissant et sans force : Sic fatus senior, telum que imbelle sine ictu conjecit.
« Nous réclamerons contre la modestie de cette épigraphe qu’applique à son livre M. de Feletz : Telum imbelle sine ictu conjevit senior. Non, ce n’est pas un trait débile et sans portée que la main du spirituel vieillard vient de lancer dans l’arène. » (Revue de Paris)
« Des allusions fort peu voilées firent justice de Clovis ressuscité pour mourir encore, et des théories du Discours au roi, Desmarets en vint aux injures. Boileau eut le bon goût de se taire. Son adversaire avait quatre-vingts ans et mourait deux ans après avoir lancé contre son jeune vainqueur le trait de Priam, telum imbelle sine ictu. » (Charles NISARD, Histoire de la Littérature française)
« Si une femme essaye de me percer avec un poignard et que sa faible main ne réussisse pas même à déchirer mon habit, telum imbelle sine ictu, je ramasse le poignard et je le lui remets dans la main en souriant. » (Jules SIMON)
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