Daniel Lejeune, responsable de la bibliothèque de la Société nationale d’horticulture de France, raconte l’origine des délicieuses fraises à gros fruit de nos jardins
En 1712, un capitaine du génie maritime prénommé François Amédée, quitta Saint-Malo pour dresser une cartographie des côtes chiliennes. Il y découvrit à terre une fraise locale à gros fruits parfumés, de couleur étonnamment blanche, dont il rapporta quelques plants. Ces derniers prolongèrent leur périple jusqu’à Marseille, au jardin botanique de Brest, et finalement, à Plougastel où quelques amateurs cultivèrent cette Blanche du Chili. Cerise, ou plutôt fraise sur le gâteau, ce marin portait un nom prédestiné : il s’appelait Frézier !
François-Amédée Frézier en uniforme d’ingénieur des fortifications |
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Peu après, Antoine Nicolas Duchesnes, jardinier à Trianon, réunit une somptueuse collection de fraisiers des deux mondes, l’Ancien et le Nouveau. Il hybrida le fraisier du Chili avec celui de Virginie, reçu du Québec et obtint les premières fraises à gros fruits.
« Saint Joseph », première fraise remontante
Plus tard, vers 1842, l’horticulteur Jamin, installé à Bourg-la-Reine (aujourd’hui dans les Hauts-de-Seine) obtint une superbe variété de haute qualité qu’il dédia à la vicomtesse Héricart de Thury, épouse du président fondateur de la Société d’horticulture de Paris. Le jargon jardinier, toujours simplificateur, en réduisit le nom à Héricart de Thury, puis à Héricart, puis finalement à Ricart, encore qu’elle n’ait nullement un parfum anisé. La Ricart sera cultivée jusque dans les années 1930.
Fraisier remontant à gros fruits Jeanne d’Arc. Illustration extraite de la Revue horticole parue en 1898 |
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Autre date importante dans l’histoire de ce délicieux petit fruit rouge : en 1893, l’abbé Thivolet obtint par miracle la Saint Joseph, première des variétés réellement remontantes. C’est-à-dire capable de fleurir plusieurs fois dans la saison et donner des fruits jusqu’en octobre.
On a coutume aujourd’hui de dire que seul le naturel est bon. Pourtant, si l’on compare les fraises des bois, délicieuses au demeurant, avec les variétés euro-américaines cultivées dans nos jardins ou exposées sur les étals des primeurs, il est indéniable que, grâce à la sélection, le progrès existe en horticulture !
Marc Mennessier et Valérie Lejeune
Le Figaro
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