Lorsque La Fontaine publia son livre Les Amours de Psyché et de Cupidon (1669), la malignité de quelques courtisans voulut insinuer à plusieurs personnes qu’il avait eu en vue certaines amours de Louis XIV. L’on crut y découvrir des traits de plaisanterie et de satyre, qui, sans être même voilés par la fiction, s’appliquaient exactement à ce monarque.
Le goût de ces commentaires et la fausse clef de cette prétendue énigme commençaient à s’accréditer, lorsque La Fontaine, qui ne s’apercevait de rien, et qui n’avait eu aucune mauvaise intention, fut tout à coup effrayé par les avertissements de ses amis, et par la conséquence de ces bruits.
Illustration réalisée d’après une peinture de Schall et extraite de Les Amours de Psyché
et de Cupidon par Jean de La Fontaine, édition de 1791
Il courut faire part de ses craintes au duc de Saint-Aignan, l’un des favoris de Louis XIV, qui, sans adopter entièrement ses excuses, en eut cependant compassion, et promit de le tirer d’affaire. « Faites relier, lui dit ce seigneur, un exemplaire de cet ouvrage. Je vous introduirai chez le roi, dans le moment qu’il sera le plus environné de courtisans ; vous lui présenterez vous-même votre livre, et soyez persuadé qu’après cette démarche il n’y aura plus d’interprétations. »
Ce projet eut le succès qu’on en attendait : chacun se tut, et La Fontaine reprit sa tranquillité ordinaire.
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