Période d’attente — d’une durée de quatre semaines dans l’Église latine — de l’arrivée du Rédempteur des hommes, l’Avent, que l’on écrivait encore Advent au XVIIe siècle — rappelant le mot latin adventus —, fut établi à l’imitation du Carême, mais ne remonte pas comme celui-ci aux temps apostoliques, car il ne saurait être antérieur à la fête de Noël ; or celle-ci, sous ce nom, ne date que du IVe siècle de l’ère chrétienne.
Le monument le plus précis de l’Avent, par rapport à son antiquité, est une ordonnance de saint Perpet, évêque de Tours au Ve siècle. Il ordonne qu’à partir de la fête de saint Martin (11 novembre), si spécialement solennelle dans cette contrée, jusqu’à Noël, on jeûnera trois fois par semaine : c’est ce qui a fait nommer l’Avent, le carême de saint Martin. On croit que jusqu’au VIe siècle cette institution n’a guère dépassé les limites du diocèse de Tours.
Mais un concile de Mâcon tenu en 581 adopta l’usage consacré à Tours, et bientôt toute la France observa ces trois jours de jeûne par semaine depuis la saint Martin jusqu’à Noël. Il fut en même temps réglé que les offices se feraient en Avent selon le même Rit qu’en Carême. La piété des fidèles avait, en certains pays, dépassé les prescriptions adoptées par le concile de Mâcon, et on jeûnait tous les jours de l’Avent. Cette ferveur se relâcha, et il n’y eut bientôt guère que les ecclésiastiques qui observassent ce jeûne.
Cependant en France, selon Durand, au XIIIe siècle, le jeûne était généralement observé. Durand de Mende parle de trois semaines entières avant Noël qui furent spécialement destinées par l’apôtre saint Pierre pour se préparer à l’avènement ou Advent de Jésus ; mais il n’en apporte aucune preuve. Du reste, il semble que lorsque saint Perpet fit son ordonnance, il existait certainement quelque chose de très semblable à notre Avent, et qu’il ne fit que sanctionner cette pieuse pratique en la faisant commencer le lendemain de la fête de saint Martin qui était pour son Église, comme nous l’avons dit, une époque des plus remarquables de l’année. Cette quarantaine était encore généralement observée du temps de Charlemagne. Bientôt, cependant, on borna ce temps à celui qui court depuis la fête de saint André jusqu’à Noël. La solennité de cet apôtre était en effet plus universelle que celle de saint Martin. Déjà au XIIIe siècle, le jeûne de l’Avent n’était plus pratiqué communément. On cite dans la Bulle de canonisation de saint Louis, roi de France, le zèle avec lequel il observait ce jeûne. Ce n’était donc plus qu’un usage observé seulement par les chrétiens d’une rare piété.
Quand le pape Urbain V monta sur le siège pontifical, en 1362, il se contenta d’obliger les gens de sa cour à l’abstinence, et il n’y est plus question de jeûne. Rome avait coutume d’observer cinq semaines d’Avent qui précédaient la fête de Noël. Il en est parlé dans le Sacramentaire de saint Grégoire. La Liturgie ambrosienne ou de Milan en compte six. Les Grecs n’avaient pas non plus une uniformité complète : c’était un jeûne facultatif que les uns commençaient le 15 novembre, d’autres le 6 décembre, d’autres seulement quelques jours avant Noël.
L’Église occidentale, depuis plusieurs siècles, commence le temps de l’Avent le dimanche qui tombe entre le 27 novembre et le 3 décembre. Elle n’y observe plus ni jeûne ni abstinence extraordinaires. Il est important de considérer qu’en aucun temps l’Église n’a imposé, comme une obligation rigoureuse, le jeûne et l’abstinence comme elle l’a fait pour le Carême. On ne peut y voir qu’une fervente piété des fidèles qui, pour se préparer à la grande fête de Noël, ont voulu la faire précéder d’un temps plus ou moins destiné à la mortification et à la prière. Les papes et les évêques ont secondé cette édifiante ferveur, mais jamais une parfaite et unanime prescription n’a pu s’établir. On ne manque pas de preuves positives pour établir le fait que nous venons d’énoncer. Aucune peine canonique n’a jamais été attachée à l’infraction des pratiques de l’Avent, telles que l’abstinence et le jeûne. Les ordres religieux mêmes se contentaient déjà, du temps de saint Bernard, d’une abstinence plus sévère que dans les autres époques de l’année, excepté celle du Carême.
Le temps de l’Avent a pris dans l’Office les mêmes Rites que le Carême, à peu de chose près, et un esprit de pénitence et de tristesse y préside. La couleur du temps est le violet et autrefois c’était le noir. Néanmoins il admet un plus grand nombre de fêtes que le Carême. L’Alleluia n’y est point supprimé, « parce que, dit Durand, au temps de l’Avent, toute allégresse n’est pas bannie puisqu’on espère en l’Incarnation du Fils de Dieu ». Les noces y sont prohibées, même après la fête de Noël jusqu’à l’Épiphanie. Cette prohibition fort ancienne s’explique lorsqu’on se rappelle que primitivement la fête de la naissance de Jésus se célébrait le 6 janvier, sous le nom de Théophanie. Il existe une ordonnance du roi Jean qui défend aux magistrats de vaquer aux travaux de la judicature pendant l’Avent : In adventu Domini nulla assisa capi debet.
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