Surnommé le Bègue ou le Fainéant, fils de Charles le Chauve et d’Ermentrude, il naquit le 1er novembre 846, fut fait roi d’Aquitaine par son père, en 867, et lui succéda dans le royaume de France en 877 ; mais ce ne fut pas sans éprouver beaucoup de difficultés.
Pendant le séjour de Charles le Chauve en Italie, il s’était élevé en France contre ce prince un parti puissant ; ce parti se trouva tout formé pour refuser la couronne à Louis, qu’une santé faible et l’embarras qu’il avait de s’exprimer rendaient peu redoutable aux factieux. L’impératrice Richilde, veuve de Charles le Chauve, avait ignoré la conspiration formée contre son époux ; mais, comme Louis n’était pas son fils, et qu’elle avait le plus vif désir de voir le duc Boson son frère s’élever jusqu’à la souveraineté, elle se rangea du parti des mécontents, dans l’espoir que les divisions qui s’annonçaient serviraient l’ambition de ce frère chéri.
Louis II le Bègue. Gravure de Charles-Amédée Colin (1845), d’après la peinture de Louis-Félix Amiel et parue dans Galeries historiques de Versailles publiées par l’ordre du roi de Charles Gavard |
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Louis le Bègue, apprenant à la fois la mort de son père et les dangers qui menaçaient le trône, part d’Orreville, maison de plaisance entre Arras et Amiens, dispose des places et des trésors de son père en faveur de ceux qu’il rencontre, et prodigue l’argent et les grâces pour se faire des partisans. Cette conduite devient le premier grief qu’allèguent contre lui les seigneurs, convaincus qu’il ne peut rien accorder sans leur consentement.
En effet, depuis l’usurpation de Pépin le Bref la couronne était devenue élective, et le sacre était regardé comme une condition nécessaire du pouvoir royal ; or, Louis, non reconnu par les seigneurs, non sacré par les évêques, n’était rien : telle devait être la conséquence de la fausse politique des premiers carolingiens aussitôt que les grands seraient parvenus à s’entendre.
L’impératrice Richilde, s’étant aperçue que les mécontents ne la flattaient que pour l’éloigner du roi, et craignant d’avancer la ruine de Boson en se pressant trop de l’élever, montra le testament par lequel Charles le Chauve appelait son fils Louis à lui succéder, et elle lui remit l’épée de Charlemagne, la couronne, le sceptre, le manteau royal. Ces signes du pouvoir ayant rapproché de lui les esprits divisés, il fut sacré à Compiègne par Hincmar, archevêque de Reims, au commencement de décembre 877.
Son père était mort le 6 octobre. Ainsi la France fut deux mois incertaine si elle aurait un roi et quel il serait. Louis le Bègue, forcé d’accepter les conditions qui lui furent imposées, ne se trouva pas plus puissant étant sacré qu’il ne l’avait été avant son sacre. Le pape Jean VIII, après avoir été forcé de se reconnaître tributaire des Sarrasins qui dévastaient l’Italie, était devenu prisonnier de quelques seigneurs italiens.
Étant parvenu à s’échapper, il publia un manifeste contre son persécuteur Lambert, duc de Spolète, et il y déclara que les cruautés exercées contre lui l’obligeaient à passer en France pour réunir les rois et demander leur protection. Il écrivit en même temps à Louis le Bègue pour le prier d’avoir pitié de ses larmes, et le nomma son conseiller secret, comme l’avait été l’empereur son père, lui déclarant qu’en cette qualité le roi pouvait indiquer un concile à Troyes, où il se trouverait incessamment.
Le pontife y arriva en effet, accompagné de Boson et de la princesse sa femme, qui lui avaient rendu à Arles les plus grands honneurs. Louis, retenu à Tours par la faiblesse de sa santé, n’arriva que lorsque le concile était près de sa fin. A l’exemple de Pépin, il voulut être sacré par la main du pape, et le pontife remplit ce désir ; mais il refusa de couronner la reine Adélaïde, que Louis n’avait épousée qu’après avoir répudié Ansgarde, sœur d Odon, comte de Bourgogne.
Comme Louis avait contracté ce mariage à l’insu de son père, celui-ci l’avait ensuite contraint de le rompre. L’amertume du refus que fit le pontife fut adoucie par d’autres concessions, et surtout par l’excommunication de quelques seigneurs rebelles, qui, néanmoins, ne déposèrent pas les armes. Le monarque fut même bientôt après obligé de signer avec eux, et notamment avec Gosfrid, comte du Mans, des traités honteux, et qui contribuèrent beaucoup à l’avilissement et à la chute de la maison carolingienne.
Les princes de Germanie, qui avaient été appelés au concile, n’y étaient pas venus, et Louis se trouvait hors d’état de donner au pape les secours dont il avait besoin. Cependant le pontife retourna en Italie, où la présence de Boson le fit respecter de ses ennemis. Louis se rendit à Mersen, où il eut une entrevue avec le roi de Germanie, qui signa un traité de paix avec lui. Bernard, marquis de Gothie, s’étant déclaré contre le roi, ses États furent donnés à Bernard, comte d’Auvergne.
Le premier, ainsi dépossédé, se retira en Bourgogne, où il possédait les comtés d’Autun et de Mâcon ; l’on préparait une expédition pour l’en chasser, à la tête de laquelle devait se mettre le roi ; mais la maladie de langueur qui le consumait depuis longtemps l’arrêta à Troyes, d’où il se fit ensuite porter à Compiègne, où il expira le 10 avril 879. De nombreuses concessions furent faites par lui aux grands seigneurs, et son règne est l’époque où s’établirent beaucoup de seigneuries, de duchés et de comtés. Ansgarde lui avait donné deux fils, Louis et Carloman.
Adélaïde mit au jour, après sa mort, un fils connu sous le nom de Charles le Simple ; et l’on vit deux assemblées rivales occupées à décerner la couronne, tandis que les seigneurs démembraient la France pour ajouter à leurs domaines, et que les plus puissants ou les plus habiles se créaient des royaumes. Quelques savants ont prétendu que Louis le Bègue fut empereur ; mais ce titre ne lui est donné dans aucun monument.
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