Surnommé le Simple, fils posthume de Louis le Bègue et petit-fils de Charles le Chauve, il naquit le 17 septembre 879, et ne fut point appelé à partager le royaume de France, dont une partie fut divisée entre Louis III et Carloman, ses frères, tandis que l’autre partie était envahie par les grands de l’Etat.
Après la mort de Louis III et de Carloman, il semblait que Charles dût monter sur le trône ; mais les seigneurs alléguèrent sa jeunesse, jetèrent des doutes sur la légitimité de sa naissance, et disposèrent de la couronne en faveur de Charles le Gros, sous prétexte que la France, de toutes parts attaquée par les Normands, avait besoin d’un prince puissant pour la défendre. La France fut mal défendue, et Charles le Gros périt victime des factions qui l’avaient appelé.
Le seul moyen de chasser les Normands du royaume était de se presser autour du monarque légitime : mais ce moyen ne fut pas employé. Pour se faire une juste idée de la confusion qui régnait alors, il suffit de remarquer qu’il y avait un régent pour Charles le Simple, tandis que Charles le Gros gouvernait sous le titre de roi. Après la mort de Charles le Gros, arrivée au commencement de 888, Charles le Simple fut encore éloigné du trône à cause de son jeune âge. Eudes, comte de Paris, fut élu roi ; ce qui n’empêcha point de sacrer Charles le Simple le 29 janvier 893 : il touchait alors à sa quatorzième année.
Charles III le Simple (898-922) |
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La France eut donc deux monarques rivaux, quoique son territoire se trouvât beaucoup diminué par l’usurpation des seigneurs. Eudes étant mort le 3 janvier 898, Charles se trouva seul roi de France, mais avec si peu de pouvoir, qu’il fut réduit à donner à Rollon, chef des Normands, l’ancienne Neustrie en toute souveraineté, et sa fille Gisèle en mariage ; Rollon demanda de plus le duché de Bretagne, et le roi y consentit, parce qu’il n’était ni assez puissant pour le refuser, ni assez maître de la Bretagne pour croire donner quelque chose.
Le désordre qui régnait en France s’était étendu sur toute l’Europe ; partout la féodalité s’armait contre le pouvoir royal ; partout les trônes étaient ou vacants, ou occupés à la fois par plusieurs souverains. Charles était parvenu à ressaisir la Lorraine, qui avait été séparée de la France. C’est le seul titre qu’il ait à sa gloire ; et cependant cette action glorieuse réveilla les factions, parce que les factions ne craignaient rien autant qu’un roi qui serait assez puissant pour se faire obéir ; aussi n’osa-t-il pas faire valoir les droits qu’il avait à la couronne impériale.
Charles connaissait sa faiblesse, et n’ignorait pas que les seigneurs étaient presque tous voués à Robert, frère d’Eudes, qui aspirait à la royauté. Ne voulant pas choisir un ministre parmi les grands, il donna toute sa confiance à Haganon, simple gentilhomme, qui avait toutes les qualités nécessaires pour gouverner et la France et son roi. Le seul tort de Charles fut de ne pas cacher assez l’ascendant qu’il avait accordé à son favori, ascendant tel, que, sans sa permission, personne n’approchait plus du monarque ; ce qui fit dire au duc de Saxe, choqué de n’avoir pu être présenté au roi : « Ou Haganon sera bientôt roi avec Charles, ou Charles ne sera bientôt plus qu’un simple gentilhomme avec Haganon. »
En effet, Robert, profitant du mécontentement des seigneurs, sut les engager dans une assemblée tenue à Soissons, à déclarer qu’ils ne reconnaissaient plus Charles pour roi. Cette révolte prit bientôt les caractères d’une guerre civile, et Robert fut sacré en 922.
Il était dans la destinée de Charles le Simple de n’être jamais seul roi en France. Il ne perdit pas courage ; car, l’année suivante, il livra aux factieux une bataille dans laquelle il tua Robert de sa propre main ; mais les chefs de parti se reproduisent aisément dans les temps de discorde ; Hugues, fils de Robert, ranima le courage des soldats à la vue du cadavre de son père, et poussa si vivement Charles, qu’il l’obligea à prendre la fuite.
Ce prince chercha un asile près d’Herbert, comte de Vermandois, qu’il était autorisé à regarder comme le plus chaud de ses partisans. Herbert le tint prisonnier à Château-Thierry, puis à Péronne, et traita avec le parti opposé, d’autant plus à son avantage, qu’il lui suffisait, pour se faire craindre, de menacer de rendre la liberté à son roi ; ce qu’il fit en effet, mais pour peu de jours.
La couronne fut déférée à Raoul ou Rodolphe, duc de Bourgogne, qui fut sacré le 13 juillet 923, dans l’église de Saint-Médard de Soissons. Hugues le Grand, fils de Robert, eut la sagesse de résister au parti qui voulait le choisir pour roi. Charles le Simple ne cessa de vivre que le 7 octobre 929, dans la 50e année de son âge, la 37e de son règne, et la 7e de sa captivité. Il laissa de la reine Ogise, sa quatrième femme, un fils, que cette princesse emmena en Angleterre, et qui est connu sous le nom de Louis d’Outremer.
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