Se tourmenter, s’inquiéter à tout propos
Une vive émotion de l’âme peut produire une surabondance de bile, la colère étant la plus forte des émotions ; on lui attribue l’augmentation de cette bile qui est sécrétée par le foie.
Planche anatomique du XVIIIe siècle tirée de l’Encyclopédie ou Dictionnaire Raisonné des Sciences, des Arts et des Métiers |
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Il en est résulté que, prenant la cause pour l’effet, on a voulu indiquer la colère par le mouvement de la bile, comme le confirment les exemples suivants pris, d’abord dans Molière : « Ce discours m’échauffe la bile », puis dans La Bruyère : « Ils ont une bile intarissable sur les plus petits inconvénients » ; enfin dans ce vers de Boileau : « Et quel homme si froid ne serait plein de bile ! »
Voici une phrase où Voltaire a employé la même expression : « Il n’y a que la méchanceté orgueilleuse et hypocrite qui m’a quelquefois ému la bile. » On trouve dans madame de Sévigné : « Il ne faut pas que vous vous fassiez de la bile noire. » Jusqu’au XVIIe siècle, on a dit : Se faire de la bile noire, ce qui signifiait : Etre triste, s’ennuyer. Depuis, on a supprimé l’adjectif et actuellement on dit tout simplement : Se faire de la bile.
Nos ancêtres qui n’avaient pas étudié, autant que nous, la structure du corps humain et les éléments qui le composent, admettaient deux sortes de bile : la bile jaune qui existe réellement dans notre corps et la bile noire qui n’est qu’imagination. Voilà comment une expression qui a signifié : Se mettre en colère, en est arrivé à vouloir dire : S’ennuyer ou se tourmenter.
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