Les protestants, peu satisfaits de l’édit de Nantes que Henri IV leur avait accordé, voulurent étendre leurs privilèges et se rendre absolument indépendants. Tel fut l’objet de l’assemblée de Châtellerault. Leurs chefs, qui la plupart n’osèrent y paraître, étaient le duc de Bouillon, Duplessis-Mornay, Lesdiguières, d’Aubigné, etc. Henri IV, justement inquiet de cette menée, envoya Sully pour faire avorter des projets qui tendaient à bouleverser de nouveau le royaume. Sully en parle dans ses Mémoires, et son témoignage ne doit pas être suspect, puisqu’il persévéra toujours dans la religion protestante :
« Ce sera, dit ce grand homme, une honte éternelle pour le duc de Bouillon, Duplessis, d’Aubigné, Constant, Saint-Germain, et quelques autres, mais surtout, je le répète, pour Lesdiguières, d’avoir souscrit à un Mémoire dans lequel on jette les fondements d’une république calviniste au milieu de la France, libre et absolument indépendante du souverain. Je sais bien que les termes ne se trouvent pas dans le Mémoire ; on les y a évités avec un soin qui paraît étudié ; mais les termes ne font rien, là où se trouve la réalité ; et je fais toutes ces personnes elles-mêmes juges de ce qu’on peut entendre par l’établissement d’un corps dont les chefs sont aussi étroitement liés ensemble, que séparés d’avec les autres, et de conseils provinciaux qui prennent la loi d’un conseil suprême général ; ce que signifie cet appui qu’on y cherche chez l’étranger, cette obligation qu’on y impose à tous gouverneurs et gens en place, de prêter certains serments ; enfin l’exclusion qu’on y donne à tous catholiques romains, et à tout officier attaché particulièrement au roi, des charges, dignités et des affaires du nouveau parti. »
Sully parvint à détourner cet orage : ses excellents raisonnements, joints à l’autorité de gouverneur de la province et de ministre du roi, ramenèrent la majorité des protestants.
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