LA FRANCE PITTORESQUE
25 juillet 1685 : le duc de Montmouth
est décapité à Londres
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Publié le mercredi 25 juillet 2012, par Redaction
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Jacques, duc de Montmouth, fils naturel de Charles II, roi d’Angleterre, né à Rotterdam en 1649, fut mené en France à l’âge de neuf ans, et élevé dans la religion catholique. Le roi son père, ayant été rétabli dans ses Etats en 1660, le fit venir à sa cour, et lui donna des gages de sa tendresse. Il le créa comte d’Orkenay (titre qu’il changea ensuite en celui de Montmouth), le fit duc et pair du royaume d’Angleterre, chevalier de l’ordre de la Jarretière, capitaine de ses gardes, et l’admit dans son conseil.

Le duc de Montmouth servit son père avec autant de zèle que de succès. Il remporta une victoire signalée sur les rebelles d’Ecosse. Il passa ensuite au service de la France, avec un régiment anglais, se signala contre les Hollandais, et fut fait lieutenant-général des armées de France. De retour en Angleterre, il continua de se distinguer. Envoyé en 1679, en qualité de général, contre les rebelles d’Ecosse, il les défit ; mais peu de teins après il se joignit aux factieux, et trempa même dans une conspiration formée pour assassiner le roi Charles II, son père, et le duc d’York, son oncle. Charles, sollicité par sa tendresse autant que par la bonté de son cœur, pardonna à ce fils rebelle.

Cet excès de clémence ne changea point son cœur, naturellement porté à tous les attentats de l’ambition. Il se retira en Hollande pour attendre le moment favorable de faire éclore ses projets. A peine eut-il appris que le duc d’York avait été proclamé roi, sous le nom de Jacques II, qu’il passa en Angleterre pour y faire révolter les peuples. Après avoir rassemblé des troupes, il hasarda le combat contre celles de son souverain ; il fut vaincu et contraint de se sauver à pied. Deux jours après la bataille, on le trouva dans un fossé ; couché sur de la fougère. Dès qu’il fut arrêté, il écrivit au foi dans les termes les plus soumis pour demander grâce, et il obtint la permission de venir se jeter aux pieds de Jacques II, mais ce prince fut inflexible.

« Jacques avait (dit l’abbé Millot) une occasion précieuse de se signaler par la clémence ; mais il ne montra que de la rigueur. Sa victoire fut suivie des plus barbares exécutions. Le colonel Kirke, soldat de fortune, dont l’âme féroce ne respirait que le sang, poussa la cruauté jusqu’à se faire un jeu des supplices de ceux qu’il immolait. Le chef de justice, Jefferies, encore plus inhumain, puisque son état devait le rendre plus doux, remplit de carnage les comtés qui avaient eu part à la révolte. Une dame anabaptiste fut brûlée, pour avoir reçu charitablement dans sa maison un des coupables ; et ce malheureux fut sauvé pour avoir eu la perfidie de déposer contre elle. Mylady Lile, sans autre crime que d’avoir aussi donné retraite à deux rebelles après le combat, fut également punie de mort, quoiqu’elle eût envoyé son fils combattre Montmouth.

« Selon le Père d’Orléans, Jacques, informé trop tard de ces excès, en témoigna de l’indignation, et répara autant qu’il put l’injustice. Mais comment le croire, lorsqu’on voit l’implacable Jefferies créé pair à son retour, et élevé bientôt après à la dignité de chancelier ? Etrange façon de punir un homme trop digne de l’horreur publique ! »

Saint-Foix a prétendu qu’à la place du duc de Montmouth, on décapita un homme qui lui ressemblait parfaitement, et que ce duc fut envoyé secrètement en France, où il fut enfermé avec un masque de fer.

On lit dans les Mémoires du chevalier d’Alrymple, que le matin du jour de l’exécution du duc de Montmouth, Jacques II envoya demander à déjeuner à la duchesse de Montmouth ; elle ne douta pas que son mari n’eût sa grâce ; mais Jacques II se crut généreux, en remettant à la veuve et aux enfants (ses petits-neveux) les biens qui, suivant la rigueur de la loi, étaient acquis à la couronne par la révolte de Montmouth ; et c’était cette cession, que par un défaut de délicatesse monstrueux, il s’était fait un plaisir d’aller porter lui même à la duchesse.

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