A la nouvelle de la prise de Jérusalem (15 juillet 1099), un cri de douleur et de rage s’éleva dans l’Afrique et l’Asie, et toutes les populations musulmanes, oubliant leurs haines et leurs querelles privées, s’armèrent pour la cause de la patrie et de la religion communes, et marchèrent vers la Palestine, sous la conduite du calife du Caire.
La victoire avait divisé les Chrétiens : jaloux de Godefroi de Bouillon, le duc de Normandie et le comte de Toulouse refusèrent d’abord de combattre ; la prise de Jérusalem avait, disaient ils, acquitté leur vœu. Cependant la grandeur du péril, les prières et les reproches de tous leurs frères d’armes, les ayant ramenés à des sentiments meilleurs, ils se réunirent au roi de Jérusalem, qui était déjà parti, ne laissant derrière lui que ceux qui ne pouvaient que prier. Parmi ses étendards était la vraie croix, dont on espérait les miracles qu’avait opérés la vraie lance au siège d’Antioche.
Adossée à la mer et aux montagnes qui bornent à l’occident et au midi la vaste plaine d’Ascalon, l’innombrable armée égyptienne ouvrait des ailes qu’on a comparées aux cornes d’un cerf, et dans lesquelles devait s’engloutir l’ennemi. Mais c’étaient de mauvaises troupes, sans lien entre elles, sans courage, sans expérience, tandis que tous les Croisés étaient des hommes à l’épreuve.
Au point du jour, les Chrétiens s’agenouillèrent pour recevoir la bénédiction du patriarche, qui promena la croix sainte de rangs en rangs ; puis, s’étant levés, pleins d’ardeur et de joie, ils marchèrent à l’ennemi, enseignes déployées, cymbales retentissantes, et mêlant leurs sons aux chants de guerre et aux cantiques pieux.
Les Croisés étaient au nombre de quinze mille fantassins et de cinq mille cavaliers. Derrière eux se réunit par hasard un troupeau considérable de bœufs et de chameaux, qui, suivant tous leurs mouvements, furent pris par les Egyptiens pour de la cavalerie. Ils s’imaginèrent que les Chrétiens avaient reçu des renforts d’Europe, et la peur les avait vaincus avant même que les premiers coups eussent été portés.
La victoire des Croisés fut complète et sanglante ; mais la division, qui se mit encore parmi leurs chefs, les empêcha d’en tirer aucun profil. La bataille d’Ascalon, célébrée par les poètes, est le dernier fait d’armes qui appartienne à la première croisade.
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