Maurice, comte de Saxe, naquit en 1696, de Frédéric-Auguste Ier, électeur de Saxe, roi de Pologne, et de la comtesse de Konismarck, Suédoise, aussi célèbre par son esprit que par sa beauté. Ce fut contre ces mêmes Français, qu’il devait commander un jour avec tant de gloire, que le comte de Saxe fit ses premières armes en 1708, au siège de Lille. Il se trouva en 1709 aux sièges de Mons et de Tournai, et à la bataille de Malplaquet. En 1717, il alla servir en Hongrie, sous le prince Eugène, contre les Turcs, et s’acquit de la gloire à la bataille de Belgrade.
En 1720, il vint en France, et fut présenté au régent, qui lui proposa d’entrer au service du roi, ce qu’il accepta du consentement du roi Auguste. Le comte de Saxe employa le loisir de la paix à étudier la tactique, les mathématiques ; à méditer, approfondir les principes de l’art de la guerre. En 1726, il fut élu duc de Courlande ; mais la Pologne et la Russie n’ayant pas voulu reconnaître cette élection, il fut obligé de se retirer, n’ayant pas assez de forces pour se soutenir contre ces deux puissances.
On prétend que la duchesse douairière de Courlande, Anne Ivanova, nièce de Pierre le Grand, qui l’avait soutenu d’abord dans l’espérance de l’épouser, l’abandonna ensuite, désespérant de pouvoir fixer son inconstance : cette inconstance lui fit perdre, non seulement la Courlande, mais encore le trône de Russie, sur lequel cette princesse monta depuis.
La mort du roi de Pologne ayant rallumé la guerre, le comte de Saxe servit au siège de Philisbourg, d’abord sous le maréchal de Berwick, et ensuite sous le marquis d’Asfeld, après que le maréchal de Berwick eut été emporté d’un coup de canon (12 juin 1734). Le comte de Saxe contribua beaucoup à la prise de la place, et courut plusieurs fois risque de la vie.
La mort de l’empereur Charles VI, en 1740, ouvrit au comte de Saxe une carrière où ses grands talents se déployèrent dans tout leur éclat et dans toute leur étendue. La guerre s’alluma dans toute l’Europe. C’est cette fameuse guerre de 1741, où les Français furent toujours victorieux, quand ils eurent le maréchal de Saxe à leur tête. Il n’était encore que lieutenant-général au commencement de cette guerre. Il alla servir en Allemagne et en Bohême, dans l’année de l’électeur de Bavière, qui fut depuis l’empereur Charles VII. En 1743, pendant l’absence du maréchal de Broglie, il fut un moment chargé de la conduite de l’armée, qui revenait de Bavière. Au commencement de l’année 1744, il avait été chargé de le descente projetée en Angleterre, en faveur du prince Edouard ; mais les vents contraires firent manquer l’expédition.
Ce fut le 26 mars 1744, que le comte de Saxe fut élevé à la dignité de maréchal de France. Dès ce moment, maître absolu de ses opérations, il s’égala aux Turenne et aux Luxembourg, par sa belle campagne de Courtrai, regardée comme son chef-d’œuvre : la savante inaction à laquelle se condamna ce général, est préférée à ses expéditions les plus actives et les plus brillantes. On sait que par une seule position habilement choisie, il déconcerta toutes les mesures, et rendit inutile la supériorité des ennemis.
En 1745, le maréchal de Saxe mourant, gagna la bataille de Fontenoy (le 11 mai) : la prise de Tournai, de Gand, d’Ostende, de Nieuport, etc., fut le fruit de cette victoire. L’hiver suivant il prit Bruxelles, Louvain, Malines, Namur, et termina la brillante campagne de 1746, par la victoire de Rocou. Nommé au commencement de l’année 1747, maréchal-général des camps et armées du roi, il ouvrit la campagne par la conquête de l’Ecluse, du Sas de Gand sur les Hollandais ; gagna la Bataille de Lawfeld (2 juillet), comme il avait gagné celle de Fontenoy sous les yeux du roi ; emporta Berg-op-Zoom, et obligea enfin, par la prise de Maestricht, toutes les puissances ennemies à demander la paix.
Ce héros ne survécut pas longtemps à tant de glorieux succès, et mourut deux ans après à Chambord, que le roi lui avait donné avec des pensions considérables et des lettres de naturalisation ; il était, ainsi que son père, d’une force de corps surprenante. Lorsqu’il était sur le point de mourir, « M. de Sénac, dit-il à son médecin, j’ai fait un beau songe. » Louis XV fit transporter son corps avec la plus grande pompe, à Strasbourg, pour y être inhumé dans l’Eglise luthérienne de Saint-Thomas. « Il est bien fâcheux, dit une grande princesse, en apprenant sa mort, qu’on ne puisse pas dire un De profundis, pour un homme qui a fait chanter tant de Te Deum. »
Le mausolée du maréchal de Saxe, par le célèbre Pigal, est un des beaux monuments qu’il y ait en ce genre. Ce héros est représente debout, cuirassé, avec un bâton de commandement à la main. Derrière le maréchal est une pyramide, sur laquelle est gravée l’épitaphe ; cette pyramide est ornée de plusieurs trophées d’armes et de différents attributs de la victoire ; sur le devant, s’offre un tombeau que la mort entrouvre d’une main ; de l’autre, elle tient une horloge de sable, et semble dire au héros, que l’heure fatale est arrivée. Il a déjà fait un pas pour descendre au tombeau.
La France, assise sur un des degrés qui y conduisent, retient de la main droite le maréchal et de la gauche repousse la mort. Il y a à côté du héros, un génie, sous la figure d’un enfant, qui éteint un flambeau. De l’autre côté du mausolée, l’Aigle est renversée sur le dos, les ailes déployées, le Léopard terrassé expire, le Lion paraît agité de frayeur ; symboles de l’Allemagne, de l’Angleterre et de la Hollande. Au-dessus est une figure allégorique de la Force, le coude sur une massue, et la tête appuyée sur sa main.
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