LA FRANCE PITTORESQUE
Quand les animaux avaient droit
à un réveillon de Noël
(D’après « La nuit de Noël dans tous les pays », paru en 1912)
Publié le samedi 24 décembre 2022, par Redaction
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Dans un grand nombre de provinces, les animaux eux-mêmes faisaient jadis réveillon. En Berry, les animaux de la ferme, à l’issue de la Messe de minuit, recevaient une provende extraordinaire du meilleur fourrage. Il en était ainsi en Lorraine et dans le pays bisontin.
 

Dans un village voisin de Besançon, à Mamirolle, au début du XXe siècle, un cultivateur qui n’avait aucune religion se levait avec grande diligence, pour conduire son bétail à l’abreuvoir public, tout au sortir de la Messe de minuit. Il fallait, disait-il, que ses animaux eussent la première eau de Noël. Cette habitude superstitieuse a quelque chose de bien poétique et n’est que l’application abusive d’une idée admirable du Mystère de Noël.

Voici un siècle encore, dans certaines paroisses perdues des montagnes de l’Auvergne, à l’occasion de Noël, tous les animaux participent aux réjouissances communes ; il n’est pas une tourterelle ni un pigeon qui ne fasse réveillon. Le même usage existe en Bretagne. Au retour de la Messe de minuit, on donne à tous les animaux une botte du meilleur foin qui se trouve à l’étable. Les paysans bretons (de Bignan, au diocèse de Vannes) pensent qu’il est convenable que les animaux eux-mêmes participent à la joie universelle, la nuit de Noël, en mémoire de la place que Dieu leur assigna, d’après la tradition, dans l’étable de Bethléem, au moment de la Nativité.

Le joyeux Noël des animaux. Couverture de l'ouvrage de Kathryn Jackson (illustré par Richard Scarry), paru en 1959
Le joyeux Noël des animaux. Couverture de l’ouvrage
de Kathryn Jackson (illustré par Richard Scarry), paru en 1959

En Touraine, dans plusieurs villages, la Messe de minuit terminée, chacun regagne sa demeure. Mais avant l’aller prendre sa part au gai repas du réveillon, le maître de la maison passe d’abord à l’étable. En souvenir des deux animaux qui, de leur tiède haleine, ont échauffé les membres tremblants du Sauveur-Enfant, il donne à chacun de ses animaux domestiques une double ration. C’est leur réveillon à eux.

Le poète qui a si bien chanté le réveillon des oiseaux devait aussi chanter le réveillon des animaux ; il l’a fait sous le titre gracieux de La gerbe de Noël :

Dans les nombreux pays où la sainte croyance
Vit encor dans le cœur du campagnard heureux,
A l’heure où de Jésus on chante la naissance,
On observe un usage aussi bon que pieux.

La venue ici-bas de cet Enfant aimable
Mit en liesse la terre, aux chants du Paradis ;
De même le croyant s’en va dans son étable
Réjouir son bétail, ses agneaux, ses brebis.

Il donne à l’âne, au bœuf, une exquise provende,
Aux chèvres, aux moutons, ou du sucre ou du sel :
Car tout être vivant doit, suivant la légende,
Faire son réveillon dans la nuit de Noël.

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Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.

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