Raisonner fort mal, en dépit du bon sens
On a regardé l’huître comme étant placée au dernier degré de l’animalité, quoiqu’il y ait au-dessous d’elle un assez grand nombre d’animaux qui lui sont inférieurs sous le rapport de l’organisation, ainsi que des résultats de l’organisation, et l’on a cru que ce bivalve, jugé incapable de se mouvoir, était à peine doué de sensibilité, et totalement dépourvu des facultés de l’instinct.
L’expression qui nous occupe peut être dérivée de cette croyance ; cependant on pense qu’elle est provenue d’une allusion aux discours tenus par une huître dans la Circé de Giovanne Baptista Gelli, poète et philosophe florentin. Cet ouvrage, qui fut très répandu et très goûté en France au XVIe siècle, représente Ulysse dialoguant avec ses compagnons changés en bêtes, et cherchant à leur persuader de reprendre la forme humaine, que la magicienne Circé doit leur rendre, pourvu qu’ils en témoignent le désir.
Le premier auquel il s’adresse est une huître, qui se montre fort contente de l’être, et qui veut prouver par une foule de raisons qu’une huître vaut mieux qu’un homme. Il s’adresse ensuite tour à tour aux autres ; mais tous, à l’exception du dernier, qui est l’éléphant, lui répondent par de semblables arguments ; ils raisonnent comme l’huître.
Copyright © LA FRANCE PITTORESQUE
Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.