François le Métel de Boisrobert est moins connu par ses ouvrages que par l’agrément de son humeur et l’enjouement de sa conversation, qui en firent l’amuseur en titre du cardinal de Richelieu. Cet emploi lui valut l’abbaye de Châtillon-sur-Seine, et un bon doyenné, qui lui rapportait de quoi frire, à ce que dit Malleville.
L’abbé de Boisrobert, homme d’esprit et homme de lettres, trouva le moyen d’ennoblir son personnage de plaisant et de complaisant du cardinal, et de l’élever jusqu’à la dignité d’ami, en fortifiant dans ce ministre son penchant à protéger les lettres : c’était travailler en même temps pour la gloire de sa nation et pour celle de son bienfaiteur. S’il est vrai que ce soit l’abbé de Boisrebert qui ait donné au cardinal l’idée d’instituer l’Académie française, on ne doit pas être étonné de voir son nom dans la liste des premiers académiciens. Cette liste ayant été faite par le cardinal, l’abbé de Boisrobert, qui était son bel esprit de profession, ne pouvait y être oublié.
Bas-relief représentant Boisrobert sur la façade de l’hôtel Malherbe à Caen
L’abbé de Boisrobert a fait des tragédies, des comédies, des romans, des poésies fugitives, et très fugitives, comme tout le reste. Il était un des cinq auteurs que le cardinal de Richelieu employait à la composition des pièces, dont il leur donnait le sujet, et dont quelquefois il leur traçait le plan. Ces cinq auteurs étaient Boisrobert, Corneille, Colletet, l’Etoile et Rotrou ; aujourd’hui que le rang de ces auteurs est fixé, on ne voit plus que de la bizarrerie dans cette association, et qu’une inégalité choquante entre les associés.
Boisrobert eut un moment de disgrâce ; mais comme il avait peu d’ennemis, et qu’il avait su se ménager l’amitié de Citois, premier médecin du cardinal, ce moment fut court. Le médecin fit rentrer en grâce le plaisant, dont la bonne humeur donnait de l’efficacité à ses remèdes. Dans la conversation, il disait au cardinal : « Monseigneur, n’oubliez pas que toutes nos drogues sont inutiles, si vous n’y mêlez une dragme de Boisrobert. » En effet, un homme qui faisait rire devait être bien précieux à ce triste, sombre et sévère politique, qui ne riait jamais : Fais-moi rire, dit à Arlequin le prince Farouche, dans la comédie, intitulée : La vie est un songe.
La disgrâce de l’abbé de Boisrobert avait été jusqu’à l’exil ; et l’Académie avait demandé son rappel.
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