Le prince d’Orange étant venu au secours de Saint-Omer, assiégé par Monsieur, frère de Louis XIV, fut complètement défait auprès de Cassel. Les maréchaux de Luxembourg et d’Humières, commandaient l’armée sous Monsieur. Une faute du prince d’Orange et un mouvement habile de Luxembourg, décidèrent du gain de la bataille. Monsieur chargea avec une valeur et une présence d’esprit qu’on n’attendait pas d’un prince efféminé.
Jamais on ne vit un plus grand exemple que le courage n’est point incompatible avec la mollesse. Ce prince ; qui s’habillait en femme, et qui en avait les inclinations, agit en capitaine et en soldat ; il eut un cheval tué sous lui ; il reçut un coup de mousquet dans ses armes. Le chevalier de Nantouillet eut la cuisse percée à ses côtés, et quelques-uns de ses domestiques furent tués derrière lui. Ensuite, Monsieur ayant pris Saint-Omer, revint à Versailles avec Louis XIV, qui venait de prendre Cambrai.
Ainsi le frère de Louis XIV eut un avantage que ce roi n’eut jamais, la gloire de gagner une bataille en personne. Pélisson prétend lui avoir entendu dire de l’abondance du cœur, « que, sur son honneur, il était plus aise que cela fût arrivé à son frère qu’à lui-même. » Mais Saint-Simon dit qu’il n’y eut que l’extérieur de gardé ; et même il ne le fut pas trop bien, si ce que rapporte Voltaire est exact, que le roi n’alla pas même voir le champ de bataille, quoiqu’il se trouvât tout auprès. « Dès ce moment, ajoute le même Saint-Simon, la résolution fut prise et depuis bien tenue, de ne jamais donner d’armée à commander à Monsieur ». Le tercet par lequel Benserade termine un sonnet fait en l’honneur de cette victoire, semble indiquer que le poète a pénétré les secrètes dispositions du monarque :
De l’encens qu’il mérite il (Monsieur) n’est point satisfait ; Il veut qu’on te le donne, et sa plus grande gloire, Est que tu sois loué de tout ce qu’il a fait. |
La guerre fut terminée l’année suivante (1678) par la paix de Nimègue.
Copyright © LA FRANCE PITTORESQUE
Tous droits réservés. Reproduction interdite. N° ISSN 1768-3270.