Epiphanie veut dire apparition ; les Grecs employaient ce mot pour désigner, soit la présence des dieux sur la terre, soit leur manifestation quelconque par un signe visible. En mémoire de ces apparitions ou visions prétendues, ils avaient institué des fêtes qu’ils nommaient Epipkanics.
Dans la religion chrétienne, on appelle Epiphanie ou fête des Rois l’anniversaire du jour où Jésus-Christ se laissa voir aux mages qui vinrent-d’Orient, conduits par une étoile, pour l’adorer et lui offrir de l’or, de l’encens et de la myrrhe. L’opinion vulgaire suppose que ces mages étaient des rois, quoique l’Evangile n’en dise rien : on l’aura présumé à la richesse de leurs offrandes. Dom Cahnet pense, au contraire, que ces mages étaient trois savants de la Chaldée ; il va même jusqu’à donner leurs noms, qui étaient, suivant lui, Balthazar, Gaspard et Melchior. L’Evangile ne s’explique pas plus sur les noms que sur les qualités.
Depuis une longue suite de siècles l’Epiphanie est devenue une fête de famille, dont nos poètes et nos prosateurs se sont plus à décrire la joyeuse solennité. Jamais clic n’a paru plus touchante que sous la plume de M. de Chateaubriand ; cependant tout le monde n’a pas partage’ son religieux enthousiasme. Dès le siècle précédent, on avait publié des livres contre le paganisme du Roi boit. On y soutenait que l’Epiphanie n’était qu’une réminiscence 3es Saturnales ; l’époque des deux fêtes, l’élection d’un roi, par laquelle débutait l’une et l’autre, la nature du mets principal, tout amenait des rapprochements contraires à la sainteté du christianisme. (Voy. Discours de Jean Deslions de Sentis, contre le paganisme du Roi boit.)
Malgré cette opinion colorée de raisons spécieuses, il n’est pas probable que le festin des Rois nous ait été légué par les croyances païennes. L’argument le plus fort qu’on puisse opposer à ce système, c’est que la veille des Rois, célébrée durant plusieurs siècles par le choc des verres et par les cris d’allégresse, se solennisait dans les premiers temps par le jeûne le plus austère. On s’assemblait le soir pour s’édifier mutuellement par des exemples de recueillement et d’abstinence. Peu à peu ces réunions nocturnes perdirent quelque chose de leur gravité ; le scandale s’y glissa, sans avoir besoin de l’ombre d’une tradition ancienne ; il de vint bientôt si révoltant, que l’autorité des conciles fut obligée d’intervenir et de défendre ces assemblées. On ne put les abolir entièrement, mais du moins elles subirent une réforme salutaire. Le festin seul en est resté ; pour en marquer l’origine, on eut soin de bénir le gâteau qu’on y servait, et d’en consacrer à Dieu la première part. Ce trait seul exclut toute comparaison entre la fête des Rois et les Saturnales.
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